Comment définir l’éthique en matière de communication ? Une question essentielle à laquelle des professionnels de la communication – agences de communication, communicants d’entreprises privées et étudiants – ont apporté des éléments de réponse mardi 19 octobre au centre culturel L’Ilyade à Seyssinet-Pariset. Retour sur un débat riche d’idées et d’expériences, organisé à l’initiative et auprès des étudiants en BTS communication du lycée Aristide-Berges.
La communication, un milieu éthique ?
Animé par Thibault Fréchet, ancien étudiant du BTS communication, le débat démarre par les enjeux de la communication responsable en entreprise. Intégrée à la stratégie, portée par la direction et la gouvernance, la communication éthique et responsable doit circuler partout dans l’entreprise et l’irriguer. Pour Guillaume Bessiere, responsable marketing, innovation et RSE à la SDH, et Florian Ghibaudo, chargé de communication à la SDH et membre de Com2Grenoble, l’éthique en communication se traduit par un principe de transparence et de sincérité : la communication doit reposer sur des faits concrets et des processus clairs. « Aujourd’hui, quand la SDH construit un logement, elle respecte la règlementation environnementale, mais elle va plus loin sur les normes de construction, l’isolation et les modes de chauffage. La communication et le marketing accompagnent ce positionnement de l’entreprise. Pour nous, il est essentiel d’aligner la stratégie globale de l’entreprise et la communication, d’aligner le fond et la forme, les supports et le message. »
Au-delà de la stratégie de communication, il est nécessaire de s’interroger en permanence sur la manière de délivrer son message, et notamment aux supports de communication utilisés. Si le digital paraît plus « responsable » que le papier à première vue, les communicants présents lors du débat sont unanimes pour réfuter ce constat : « l’imprimerie est le secteur le plus vertueux à ce jour », précise d’ailleurs Charline Vierne, dirigeante de l’agence Reflex2Com. Le print travaille sur ces questions environnementales depuis des dizaines d’années, en utilisant du papier recyclé, en produisant des encres qui répondent aux normes écologiques les plus élevées, en perfectionnant les machines pour qu’elles soient le moins énergivore possible… Quant au digital, son utilisation a un impact environnemental élevé (fabrication des équipements, stockage de données, consommation électrique, etc.), d’où la nécessité de penser l’utilisation du support par rapport à l’objectif et à la durée de vie du document.
S’agissant des agences de communication, l’accompagnement et la pédagogie sont des éléments clés de la relation partenariale : « Nous devons faire preuve de pédagogie, on a tous à apprendre les uns des autres » déclare Laura Bernard, dirigeante de l’agence Comasoi. Cet accompagnement s’est traduit, pour les agences Comasoi et Reflex2Com, par la création d’une charte éthique qui définit le cadre de référence de leurs pratiques managériales et de communication interne et externe, et qui repose sur 5 piliers : respecter les droits d’autrui, proposer des messages honnêtes, favoriser la justice sociale, limiter l’impact sur l’environnement et faire vivre les bonnes pratiques dans les affaires. L’importance de l’accompagnement est, par ailleurs, partagé par Stéphanie de Tellier, fondatrice de l’agence de communication L’Atelier BAO, pour qui la pédagogie participe à revaloriser l’image de la communication auprès des TPE. Toutefois, la notion d’éthique est parfois confrontée à une réalité économique : peut-on refuser un contrat avec un client-annonceur si les pratiques de ce dernier vont à l’encontre de l’éthique ou des valeurs de l’agence ? D’après Charline Vierne (Reflex2Com), la réponse est claire : oui, il est possible – et même conseillé – de refuser un tel contrat. Ce rejet entraînant même un cercle vertueux : il permet de se consacrer à des projets pour lesquels l’agence de communication partage les valeurs, et ainsi de gagner en motivation pour les équipes, en qualité de travail et de réalisation, et ainsi d’attirer de nouveaux clients aux valeurs correspondant à celles de l’agence. Alors, l’éthique s’apprend-t-elle ? « Lors de mon stage, j’ai pu constater une éthique à deux vitesses selon les organisations. J’avais des tâches intéressantes, j’étais reconnu dans certaines entreprises… Alors que dans d’autres entreprises, le stagiaire réalisait les tâches que les autres ne voulaient pas faire », déplore Romain Piaud, étudiant en 2ème année du BTS communication. Côté entreprise, et notamment concernant la SDH, Guillaume Bessière précise : « C’est le principe d’exemplarité, c’est le rôle de l’entreprise d’être exemplaire, de porter un certain nombre de valeurs et d’en donner le sens. On cherche ainsi à recruter des talents qui partagent ces valeurs. » Et Florian Ghibaudo de compléter : « On n’est pas dans l’apprentissage, on est dans l’adhésion. Éventuellement, il peut y avoir une meilleure compréhension de ces valeurs, mais on ne peut pas apprendre à être éthique. Et ce n’est pas le rôle de l’entreprise. » L’éthique se construit, et cette démarche passe notamment par le dialogue : « échanger sur l’éthique est très important. Je veux monter ma propre agence, je veux être la plus professionnelle possible. » conclut Aurane Abbas, étudiante en 2ème année du BTS communication au lycée Aristide Bergès.
Rédaction : Florian Ghibaudo
Photos : © Lucie Cerdeira